Marine Le Pen, les juges...et la contre-attaque - L'intégrale -
C dans l'air du 1er avril 2025 - Marine Le Pen, l'inéligibilité et les jugesAprès l’annonce du verdict dans l'affaire des assistants parlementaires européens du Front national (devenu Rassemblement national, RN), le parti d’extrême droite a lancé la contre-attaque politique et médiatique, à commencer par Marine Le Pen. Invitée du journal télévisé de TF1, la patronne des députés RN, qui a décidé de faire appel de sa condamnation pour détournement de fonds publics, a dénoncé hier soir une "décision politique" qui "viole l'État de droit". Puis lors d’une conférence de presse ce mardi, elle a critiqué "l’ingérence des magistrats", qu’elle qualifie de "trouble à l’ordre public". Nous ne laisserons pas les Français se faire voler l’élection présidentielle", a affirmé Marine Le Pen, fustigeant "le système".Jordan Bardella, Louis Aliot, Sébastien Chenu, Marion Maréchal…Les pontes du RN et soutiens de la cheffe de file défilent également en nombre sur les plateaux depuis hier soir et le parti appelle ses militants à se mobiliser ce week-end. Tracts, manifestation, mais aussi accusation de "décision politique" de la part de la justice ou encore l'idée que la démocratie serait en danger, le Rassemblement national martèle ses arguments pour occuper le terrain tout en évitant d'évoquer le fond du dossier des assistants parlementaires européens dans lequel Marine Le Pen et une vingtaine d'accusés ont été condamnés, ce lundi 31 mars. Alors qu’à l’étranger, les dirigeants d’extrême droite du monde entier lui apportent leur soutien : Viktor Orbán a tweeté "Je suis Marine !". Vladimir Poutine a parlé de "violation des normes démocratiques". Donald Trump a dit que cela lui rappelle ses propres affaires judicaires et Elon Musk a dénoncé "un abus du système judiciaire". Pourtant, cette condamnation est l’épilogue d’une enquête ouverte dix ans plus tôt et d’un procès de deux mois. Marine Le Pen et huit eurodéputés ont été reconnus coupables de détournement de 4,6 millions d’euros entre 2004 et 2016. L’argent du Parlement européen destiné aux assistants parlementaires a servi aux dépenses du parti d’extrême droite et des personnes qui y travaillent. "Personne n’est jugé pour avoir fait de la politique […] L’égalité devant la loi est un pilier de la démocratie. Les élus ne disposent pas d’un privilège", a martelé lors de l’énoncé du jugement la présidente du tribunal correctionnel de Paris comme pour anticiper les critiques d’une justice politisée. Dans ce dossier, a-t-elle expliqué, "la question était de savoir si le travail réalisé était bien "en lien avec le mandat" de leur eurodéputé et le tribunal n'a eu "aucun doute" sur le fait qu'il ne l'était pas. Les 12 assistants de neuf eurodéputés (dont Marine Le Pen) étaient bien "rémunérés" par le Parlement européen, alors qu'ils travaillaient "en réalité" pour le parti. La présidente Bénédicte de Perthuis a notamment évoqué le cas d'assistants parlementaires "passant d'un député à l'autre" ou à qui leur employeur ne confiait "aucune tâche". Comme, par exemple, Yann Le Pen, sœur de Marine le Pen, officiellement assistante parlementaire de Bruno Gollnisch alors qu'elle travaillait à l'organisation des grandes manifestations du parti ou encore Thierry Légier, garde du corps de Jean-Marie Le Pen puis de Marine Le Pen, une fonction qui "nécessitait une présence de tous les instants" et ne permettait pas d'être assistant parlementaire de quelqu'un d'autre. Ce mardi, le procureur général près la Cour de cassation Rémy Heitz a insisté sur le fait que la justice n’était "pas politique" : "cette décision n’est pas une décision politique mais judiciaire, rendue par trois juges indépendants, impartiaux". Le délibéré "a été rendu conformément à la loi, en application de textes votés par la représentation nationale".Fait rare, le Conseil supérieur de la magistrature a exprimé dans un communiqué son "inquiétude" face aux attaques : "Ces réactions sont de nature à remettre en cause gravement l’indépendance de l’autorité judiciaire, fondement de l’Etat de droit", a déclaré l’institution lundi, rappelant que "les menaces visant personnellement les magistrats, tout comme les prises de parole de responsables politiques sur le bien-fondé des poursuites ou de la condamnation ne peuvent être acceptées dans une société démocratique". Dans la soirée, c’est le premier président de la cour d’appel de Paris, Jacques Boulard, qui a fait part dans un communiqué de sa "vive préoccupation" face aux "menaces" et "aux attaques personnelles", "en particulier sur les réseaux sociaux", contre les trois magistrats ayant rendu le jugement. "La critique d’une décision de justice ne peut en aucun cas s’exprimer par des menaces formulées à l’égard des magistrats", a-t-il déclaré.Des menaces également condamnées par le ministre de la Justice Gérald Darmanin, les estimant "inacceptables dans une démocratie et préoccupantes pour l’indépendance de l’autorité judiciaire". Le Premier ministre François Bayrou a apporté son "soutien inconditionnel" aux magistrats menacés et ouvert la porte à une "réflexion" pour faire évoluer la loi sur l'exécution provisoire. Le Parti socialiste a de son côté annoncé l’ouverture d’une pétition "pour soutenir l’indépendance de la justice".Les experts :- JÉRÔME JAFFRÉ - Politologue - Chercheur associé au CEVIPOF- NATHALIE SAINT-CRICQ - Editorialiste politique - France Télévisions- ANNE-CHARLÈNE BEZZINA - Politologue et constitutionnaliste, maître de conférences en droit public- LAURENT VALDIGUIE - Journaliste d’investigation – Marianne 🎙️ Retrouvez C dans l'air en vidéo sur france·tv : https://www.france.tv/france-5/c-dans-l-air/ Distribué par Audiomeans. Visitez audiomeans.fr/politique-de-confidentialite pour plus d'informations.