Choses à Savoir HISTOIRE podcast

Pourquoi beaucoup de médecins de la Rome antique étaient-ils des esclaves ?

0:00
2:27
Reculer de 15 secondes
Avancer de 15 secondes

Cette réalité surprend aujourd’hui, car on imagine le médecin comme une figure respectée, savante, au service du bien commun. Mais à Rome, la médecine n’avait pas ce prestige. C’était un métier utile, certes, mais considéré comme manuel, presque servile. Les citoyens romains libres, surtout les plus aisés, voyaient mal l’idée d’un homme libre penché sur un malade ou manipulant le corps d’autrui. Ce rôle était donc souvent confié à des esclaves instruits, souvent d’origine grecque.


Les Grecs étaient alors réputés pour leurs connaissances dans les sciences et la philosophie, et beaucoup avaient été réduits en esclavage après les conquêtes romaines. Parmi eux, certains maîtrisaient les textes d’Hippocrate, de Galien ou d’Aristote. Rome, pragmatique, récupéra ce savoir à sa manière. Un riche patricien pouvait ainsi posséder un esclave formé à la médecine, chargé de soigner la maisonnée, les enfants, les domestiques et parfois même les voisins. Cet esclave, s’il s’avérait compétent, gagnait en considération et pouvait être affranchi, devenant un « médecin affranchi ». Mais son origine servile restait souvent un stigmate social.

Dans les grandes familles, on formait même des esclaves spécialement pour ce rôle. On les instruisait dans des écoles de médecine grecques, ou on les plaçait en apprentissage auprès d’un médecin expérimenté. Ces hommes (et parfois ces femmes) devenaient les « medici » du domaine, au même titre qu’un cuisinier ou qu’un scribe. Ils soignaient les blessures, préparaient des onguents, réalisaient des saignées et suivaient les accouchements. Leur valeur économique était telle qu’un médecin esclave pouvait coûter très cher sur le marché.


Il faut aussi se rappeler que la médecine romaine était très pragmatique : plus proche de la pratique que de la théorie. Le prestige allait plutôt aux philosophes, aux juristes, aux orateurs. Le médecin, lui, touchait les corps — et cela le plaçait dans une catégorie inférieure. Il n’exerçait son art que par tolérance sociale, pas par reconnaissance.


Pourtant, certains d’entre eux réussirent à s’élever. Le plus célèbre, Galien, né libre mais influencé par cette tradition gréco-romaine, fit carrière auprès des empereurs. D’autres, affranchis ou anciens esclaves, devinrent riches et respectés, preuve que la compétence pouvait parfois transcender le statut.


Ainsi, dans la Rome antique, le savoir médical circulait grâce à des esclaves savants. Ce paradoxe dit beaucoup de cette société : c’est au cœur même de la servitude que Rome a puisé une partie de son savoir scientifique.

Hébergé par Acast. Visitez acast.com/privacy pour plus d'informations.

D'autres épisodes de "Choses à Savoir HISTOIRE"